Prendre un ris, il ne s’agit pas de faire preuve d’une quelconque audace culinaire d’essence asiatique, puisque ce ris là se prend et s’écrit à l’aise sans Z mais avec un S. Même lorsqu’on le largue il garde son S et la manoeuvre ne consiste surtout pas à jeter par dessus bord un reste de riz cantonnais.

Ce ris avec S, ne correspond pas non plus aux succulents abats de veau qui sont de toute façon très difficiles à cuisiner dans un croiseur.

Ce ris là aime bien le vent fort et la grand-voile, il se prend ou se largue quand l’un des deux veut surpasser l’autre. Trop de vent, on le prend, pas assez de GV on le largue. Il va s’en dire que la manoeuvre doit être parfaitement coordonnée entre la drisse de GV, la ou les bosses de ris et l’écoute de GV. Un dysfonctionnement dans l’enchainement des manoeuvres et c’est en général la production instantanée d’une bordée de jurons et une GV de forme assez piteuse. Autant, pour garantir la sérénité du chef de bord, prendre son temps pour préparer la manœuvre, clarifier les bouts avant de l’exécuter. Et lorsque tout est bien exécuté c’est un grand moment de satisfaction qui envahit le cockpit, le bateau perd sa vilaine tendance à giter plus que de raison, plus besoin de se transformer en alpiniste pour aller sur le bord au vent, le chariot de GV reprend une position médiane rassurante, la barre s’adoucit et l’équipage attend sereinement le moment de passer au ris suivant….ou de larguer celui qu’on vient de prendre.

Le mot « ris » vient du néerlandais rees ou de l’ancien français ris. Ris est lui-même issu du verbe rider, qui ne concernait pas ces légers plis sur la peau qui font le bonheur et la fortune des fabricants de cosmétiques mais qui signifiait « Plisser ». Effectivement prendre un ris, c’est faire un pli dans la voile ! Tout est dit, un ris n’est qu’un vieux pli.

Mais maintenant si vous dégustez une plie avec du riz à bord d’un croiseur, ne criez pas au pléonasme gastronomique !

Les ris à l’irlandaise : autrefois les gabiers devant réduire la voilure se comportaient en véritables psychopathes avec elle puisqu’ils cherchaient à l’étouffer, puis l’étrangler à l’aide de cordages appropriés alors que la voile se débattait avec force pour continuer à porter. Lorsqu’il leur était impossible de la neutraliser il recouraient à leurs couteaux et taillaient dans la toile de larges fentes afin qu’elle ne vive plus. Ils disaient alors prendre des ris à l’irlandaise. Sans faire injure à la gastronomie d’outre-Manche, il est assez improbable que l’origine de l’expression soit ici d’inspiration culinaire.

Le ris auto, et non pas le risotto ! Il est venu simplifier les manoeuvres de prise de ris, une seule bosse permet d’abaisser simultanément le point d’écoute et le point d’amure de la bande de ris. Il évite d’avoir deux bosses, une pour abaisser le point d’amure et son crochet sur la bôme, l’autre pour l’écoute. Pas d’équipier qui pied de mat, tout se fait du cockpit, mais il faut quand même mouliner sur les winchs ! C’est pas complètement automatique et ça frotte pas mal sur la bosse!

Peut-on se passer des ris ? Certains ont trouvé la réponse en empruntant à la quincaillerie  culinaire encore un terme avec la bôme à rouleau. Pas de rouleau à pâtisserie mais un beau rouleau sur lequel s’enroule la voile et que la bôme supporte. C’est comme un enrouleur de génois mais placé à l’horizontale. Autre solution, le rouleau est placé dans le mat, l’enrouleur est vertical. Maintenant réfléchissez bien comment placer des lattes pour rigidifier la GV et qu’elles puissent s’enrouler. Vous aurez la réponse en observant certains bateaux naviguer comme Axis ou Moderato.

Et si un soir vous trouvez que le repas que vous faites avec quelques navigateurs est un peu terne et sans animation, lancez le débat : Ris ou GV sur enrouleur. Vous ne serez pas déçu, le débat s’animera assez vite, beaucoup plus vite qu’une commission des finances met de temps à adopter un budget !

Quelques mots sur la sortie d’aujourd’hui : deux bateaux Axis et Alios sont sortis. (La prochaine sortie concernera donc les bateaux dont le nom commence par B…). Le vent était de 15 à 17 noeuds de secteur OUEST et a forci en milieu d’après-midi, quelques bords de prés sous voilure haute (pas longtemps) puis sous voilure réduite pour conserver une barre agréable et une gite acceptable. Le retour au travers a permis de belles pointes de vitesse en dévalant les vagues, ainsi Alios a frisé les 11 noeuds et a presque rattrapé Axis. Un peu de pluie, de belles couleurs dans le ciel et un arc en ciel pour saluer les bateaux de la SRD.