Contrairement au  temps gris et à l’horizon bouché qui avaient eu la bonne idée de se donner rendez-vous dans la matinée de samedi, le soleil a eu la générosité de se réveiller pour accompagner les bateaux de l’entraînement d’automne.  Big or NO, Openfield, Fleo, Alios, Harricana, Chat Perché et Axis ont eu à gérer un petit vent de secteur Est de moins de 10 noeuds qui a pris confiance dans l’après-midi pour frôler les 15 noeuds.

En moins de temps qu’il n’en faut pour nommer, démettre, renommer un Premier Ministre, les entraîneurs, sans recourir à la moindre intelligence artificielle, ont annoncé le parcours de la journée, parcours qui intégrait bien sûr les conditions de vent. L’assemblée des skippers n’a pas censuré leur proposition (donc pas eu recours au 49-3)  : DI-bouée de Merville-bouée de Ouistreham- DI.

Ce fut donc un départ sous spi où on a pu comparer les différentes techniques d’envoi et d’emmêlement autour de l’étai, les différents modes de gestion des écoutes et de leur faculté à s’agripper à tout ce qui peut servir de point d’accroche ( bout-dehors, ancre, hauban…). Finalement après quelques efforts ponctués de saillies que la décence nous interdit de rapporter, tout le monde a eu le plaisir de voir sa grande bulle se gonfler, propulser l’étrave à fond dans les vagues pour générer un beau sillage bien éphémère. Tout le monde sauf ceux qui on renoncé à l’emploi du spi, dont ils sont pourtant dotés, en invoquant une fatigue passagère. Les mauvaises langues disent que ce n’est qu’un prétexte pour masquer leur crainte d’être dépassé, nous ne ferons pas de polémique inutile….

Les organisateurs avaient donc choisi une route qui mettait les bateaux plein vent arrière. A leur décharge il leur était difficile de déplacer les bouées ou de changer la direction du vent ! Il a donc fallu faire avec cette direction de vent.

Il est temps de parler de technique et de lancer le grand débat : Spi asymétrique ou symétrique ?

A cette allure le spi asymétrique se refuse obstinément à se gonfler et provoque une montée de tension chez son skipper, de l’agacement et finalement l’acceptation stoïque de la fatalité . Il est donc sage de ne pas viser la ligne directe sur la bouée et de faire route un peu plus près du vent. C’est ce qui s’appelle tirer des bords de grand largue, et c’est là où on comprend le sens de l’expression « bord de largue » car soit on largue les autres soit on est largué !

Le spi symétrique aime mieux travailler dans le sens du vent, bien calé au vent par son tangon il se pavane bien gonflé, se rengorge comme un député censurant un gouvernement et fait avancer son bateau vers sa destination finale. En arrière plan, on verrait le travail obscur des équipiers notamment de celui chargé de l’écoute qui n’arrête pas de choquer border au gré des humeurs névrotiques du vent apparent.

Les deux spis s’envoient en l’air, mais ici pas d’acrobatie licencieuse mais un savant mélange de manoeuvres. Pour le spi symétrique c’est un assortiment coordonné de hissage de drisse, de gestion du tangon avec sa balancine et son hale-bas, d’un bras et d’une écoute. C’est peut-être compliqué à prime abord mais ça marche et c’est plutôt stable.

Pour l’asymétrique la chaussette fait fureur à port Guillaume, une estrope d’amure et deux écoutes. C’est apparemment plus simple, mais ça réserve une inépuisable source de toxicité en renouvelant inlassablement les dysfonctionnements.

La bouée de Merville fut vite atteinte dans ces conditions et avant de passer la bouée de Ouistreham, la flottille fut détournée par une palanquée de plongeurs batifolant autour de leur bateau. La VHF assez peu sollicitée fut réveillée de sa torpeur par quelques rapides échanges. Décision de ne pas virer la bouée fut prise et toute monde mit le cap sur la DI.

C’est maintenant avec du près qu’ils durent nourrir leurs navires. Les génois se déroulent donc et contrairement au proverbe qui dit «  là où il y a du génois, y’a pas de plaisir », un peu de gite met d’excellente humeur les équipages dans ce retour vers le port.

Ces sorties d’entrainement permettent de brasser, outre les spis, les équipages et de faire découvrir les bateaux des uns et des autres avec le gros avantage d’alimenter les conversations de l’après sortie au club house. On a vu certains marins en grande contemplation de leur verre ballon en s’interrogeant et découvrant que sa forme s’apparentait à un spi !

Quelle obsession, ils ne changeront jamais !